Mis à jour le 25 mai 2018
Longtemps nous nous sommes questionnés sur l’utilité des rêves et leur sens propre. Depuis l’antiquité et leurs dimensions prophétiques jusqu’à l’apogée du tandem Freud – Jung et les manifestations de l’inconscient, nous n’avons cessé de leur attribuer des fonctions.
Seulement, en ont-ils réellement une ? Le cerveau et le sommeil nous sont encore bien méconnus et la mécanique des rêves, s’il y en a une, repose justement au centre de cette vaste zone de flou. Le doute peut donc sembler légitime : et si les rêves n’avaient en réalité aucune utilité propre ?
La question s’est posée alors que la science moderne butait face à cette énigme qui fascine les hommes depuis toujours. Peut-être, les rêves ne sont qu’un épiphénomène, une conséquence, une répercussion du sommeil paradoxal. Comme la chaleur que dégage une ampoule initialement conçue pour éclairer et non pour chauffer, les rêves pourraient être un effet secondaire, une conséquence involontaire sans but ni fonction.
Un doute légitime et une imperfection invraisemblable ! Le corps humain, cette incroyable machine sophistiquée régie par autant de complexité que d’harmonie, théâtre d’un phénomène aussi romanesque qu’inutile ?
Et bien non ! Les rêves sont bel et bien indispensables. Nous sommes désormais certains de leur utilité et nous leur avons découvert deux fonctions propres. La première concerne la créativité et la résolution des problèmes, et si son mécanisme est bluffant, il n’en est rien au regard de la seconde : le détachement de l’aspect émotionnel de l’information. Rêver nous aide à apaiser nos souvenirs !
Une mécanique stupéfiante
On peut tout à fait parler de thérapie de nuit en s’intéressant de plus près aux rêves et leur incroyable mécanique. Chaque nuit, ils nous permettent de réduire la douleur et la gravité des évènements vécus, et nous offrent ainsi une résolution émotionnelle des problématiques vécues dans la journée.
Et ce par un procédé stupéfiant ! Durant la phase de sommeil paradoxal, à l’amorce du rêve, notre organisme chasse la noradrénaline du cerveau. Cette hormone, que l’on appelle également norépinéphrine, est au cerveau ce que l’adrénaline est au corps, une puissante hormone du stress capable de nous mettre en alerte et d’induire de vives réactions émotionnelles.
Défaits de cette substance, nous ne sommes donc plus en mesure de réagir sur le plan émotionnel et notre cerveau va en profiter pour rejouer les phases traumatisantes de notre journée. Un « replay » qui nous laisse cette fois-ci stoïque et qui permet de défaire l’émotion des faits. Comme une pelure d’orange, notre cerveau retire l’émotionnel du souvenir et ancre ainsi des faits pondérés.
Un traitement des souvenirs vital dont l’absence nous plongerait dans un état d’anxiété chronique. Imaginez un instant si vous ressentiez, à l’idée d’une vieille chute de vélo durant votre enfance, le même état de stress et de peur dans lequel vous étiez quelques secondes après la chute.
Il suffirait que le hasard vous fasse penser à cette chute, puis dans la foulée à une rupture vécue à l’adolescence et votre premier entretien d’embauche pour que vous soyez sous les feux d’un torrent de stress et d’anxiété.
Les rêves sont donc garants de notre santé émotionnelle. On estime qu’entre 35 à 55% des thèmes émotionnels de notre journée refont surface dans nos rêves et ce, nous le savons désormais, pour procéder à leur apaisement.
Le cas des syndromes post-traumatiques et les rêves rémanents
Cet incroyable mécanisme mis en lumière, il nous est désormais possible d’aboutir à la théorie de Matthew Walker, éminent spécialiste du sommeil, quant à la rémanence de rêves traumatisants. En effet nous avons vu que durant le sommeil paradoxal et le début du rêve, notre organisme éliminait la noradrénaline du cerveau pour nous permettre ainsi de revivre les évènements sans réaction émotionnelle.
Si quelqu’un vit un stress important comme un accident de la route ou la perte d’un proche, son taux d’hormone du stress va grimper. Grimper au point de surpasser la capacité de l’organisme à chasser la noradrénaline du cerveau durant la phase de sommeil paradoxal.
Lors du « replay », cette personne ne parviendra donc pas à pleinement détacher l’émotion du souvenir. Son rêve sera relativement empreint de stress et les évènements ne pourront perdre leur caractère dramatique, et donc l’opération d’apaisement se soldera par un échec.
Et que fera le cerveau la nuit suivante ? Il réessaiera de nouveau ! Les thèmes émotionnels seront rejoués dans une seconde tentative d’apaisement des souvenirs. Et si les taux d’hormone du stress sont encore trop importants, le cerveau recommencera encore, et encore.
Gagner jusqu’à 90% de sommeil paradoxal en seulement deux heures !
Si nos cycles de sommeil sont parfaitement réguliers et durent systématiquement 90 minutes, les parts de sommeil lent et de sommeil paradoxal sont, elles, en constante évolution.
Le ratio sommeil paradoxal – sommeil lent augmente d’un cycle à l’autre et rend la fin de nos nuits terriblement cruciale quant à notre santé mentale et émotionnelle. Ainsi, dormir six heures et non huit n’occasionne pas seulement une réduction de 25% du temps de sommeil mais entre 60 et 90% du temps de sommeil paradoxal !
Une perte conséquente en mesure d’amener les plus réfractaires à repenser leur routine du coucher !
Dormir pour gérer son stress
Le sommeil constituait déjà la substance de mon premier article et la conclusion de celui-ci ne peut que l’appuyer : gérer son stress commence par un sommeil soigné. Un sommeil régulier, suffisant, au centre de vos priorités.
Dans son ouvrage Why we sleep, Matthew Walker s’en amuse : « Voici un nouveau traitement qui rallonge considérablement l’espérance de vie ! Il améliore la mémoire et décuple la créativité. Il rend plus attirant, permet de conserver la ligne et fait disparaitre les fringales ! Il protège du cancer, de la démence, et bien évidemment, fini les rhumes et les coups de froid ! Il diminue également les risques d’attaque cardiaque et d’AVC, sans parler du diabète qu’il éradique, tout bonnement ! Il procure également une sensation de bonheur, et diminue considérablement l’anxiété et les déprimes passagères ».
Évidemment, l’annonce semble grossière, cependant rien est faux. Et s’il existait, les gens paieraient cher pour ce médicament, même pour la plus petite des doses. Heureusement, ce médicament est gratuit, il est à la portée de tous, et il s’appelle le sommeil.
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